Intermède : Journal d'Aedan, chapitre 2.
Salut, Journal !
Je suis rentré à la maison, et j'ai postulé pour un poste de manager de groupe. J'ai été pris ! Un coup de bol, je ne m'en remets toujours pas... En même temps, lors de mon premier jour, j'ai cassé le synthétiseur et les musiciens ont planqué mes affaires au fond de grands bols de tapioca, alors...
Alors, en fait, rien n'a changé . Je reste toujours un loser célibataire. Ce ne sont pourtant pas les jolies filles qui manquent, à Dragon Valley. Mais il faut croire que mon Karma m'en éloigne toujours.
Pourtant, j'essaie d'être doux, romantique... Râteau.
Je les emmène dans les coins les plus agréables de la ville, je me décarcasse pour leur faire plaisir... Râteau.
Je m'intéresse sincèrement à elle, je les écoute me parler de leur vie, de leurs aspirations, de leurs rêves... Et puis, quand je passe aux techniques de drague....
Bref, Journal, je suis manager de groupe, mais j'aurais dû être expert à Jardiland.
Je me demande quand même si j'ai le moindre espoir de rencontrer un jour une fille qui veuille de moi. Pourtant, je suis mignon, je réussis dans mon boulot (même si je me suis ridiculisé aujourd'hui en passant la bande son de "Bonne nuit les petits" au lieu du morceau de hard rock qu'on avait répété hier). Non, rien ne devrait s'opposer à ce que je trouve l'âme soeur. Je dois mal m'y prendre, c'est tout.
Dans un élan de désespoir, j'ai même demandé conseil à Adriel. Je sais que sa vie sentimentale n'a pas été de tout repos non plus, et qu'il a mis vingt ans à conquérir Maman, il aurait dû pouvoir me dire ce qui, en fin de compte, avait fait la différence... Mais non. Pas une idée géniale pour me sortir d'affaire. Ah ! Si ! En définitive, il m'a suggéré : " Si tu penses que ta stratégie de séduction n'est pas optimale, pourquoi ne solliciterais-tu pas les conseils d'une vraie séductrice, d'une enjôleuse hors pair ? Ton amie de fac, Natty, elle a bien la réputation d'être une croqueuse de sims ?" Pas bête...
Bref, allô Natty ? Ca te dirait de passer quelques jours aux Tourelles ?
Natty est arrivée par le vol du lendemain. Tandis que j'attendais le taxi qui l'amenait de l'aeroport, je ressassais dans ma tête mes derniers déboires sentimentaux. Professionnellement, tout va bien ( si on exepte le fait qu'ils ont trafiqué la fontaine à eau, j'ai été trempé des pieds à la tête ) : j'ai même eu une promotion ! Bientôt, je pourrais abandonner le groupe de hardeux pour me consacrer à la musique classique. Je compose toujours,mais il faut bien reconnaître que mon absence totale de vie sentimentale me plombe le moral.
En tout cas, avec Nat', rien n'a changé. On s'est retrouvé, toujours sur la même longueur d'ondes. Trop occupés à se raconter nos vies (j'ai appris que son père était militaire à Riverview, et sa mère, graine de citronnier), on n'a pas vu passer le temps. Moralité, je suis arrivé en retard au travail, sans même avoir abordé le sujet critique. Pas grave, je suis trop trop content de la revoir.
Natty est arrivé juste pour l'anniversaire de Luciane. Ma petite choupinette grandit. Je prie pour qu'elle ne devienne pas une loseuse. N'importe quoi, mais pas une loseuse.
Enfin, je l'aimerai toujours, quoi qu'il arrive. Il me tarde de pouvoir lui donner ses premières leçons de solfège.
On a fêté l'anniv' de la puce en toute intimité, juste la famille et Natty. Plus de gâteau pour chacun. En même temps j'aurais pu éviter de ruiner mon tee shirt avec la chantilly.
Non seulement Luciane est gentille, non seulement elle est sage, mais en plus, elle est jolie comme un coeur. J'adore mon petit bouchon de frangine.
En même temps, quand elle s'est enfuie en hurlant en voyant Brunehilde débarrasser la table, on a tous compris : elle est devenue, en grandissant, un (tout petit peu) froussarde.
Enfin, une fois la puce couchée (ce qui a pris un bon moment : il y avait des monstres sous son lit), j'ai pu entamer ma grande conversation avec Natty. Je me suis lâché, j'ai tout déballé, Carole, Julie, Stéphanie, Gisèle, tout... Et elle m'a écouter sans même se moquer. Sans même un sourire condescendant.
Elle m'a raconté les difficultés qu'elle rencontrait à Riverview, sa réputation de croqueuse de sims, qui lui pesait. Pour Natty, la séduction, c'est un jeu, et un jeu auquel on joue à deux ( voire plus). Elle souffre que, dans sa banlieue bien pensante, on commence à la regarder avec méfiance et malveillance. C'et sûr que la vie n'est pas juste avec les femmes de son genre ; un bourreau des coeurs, c'est un Don Juan qu'on admire, une fille qui rêve d'expérimenter plein d'endroits et plein de partenaires pour faire crac crac, c'est... Une traînée.
Et pour finir, Natty m'a proposé de rester ici un bon moment. Ici, où nul ne la connaît, et où elle pourrait se remettre à séduire sans se heurter aux préjugés. Et où elle pourrait aussi me conseiller, me donner des cours, en quelque sorte. Pourquoi pas ?
C'est ainsi que Natty a emménagé aux Tourelles.
Salut, Journal !
Il ne faut pas croire que Natty a comme seul objectif la conquête amoureuse. Elle prépare aussi des plans, des schémas, qu'elle ne veut pas me montrer. Elle mijote quelque chose, un projet professionnel peut être ? En tous cas, ça l'occupe une bonne partie de son temps. Ca et le jardin. Mais peu à peu les plantes entre en dormance, impossible d'avoir une discussion soutenue avec elles.
Enfin, elle sait se détendre, aussi...
Mes parents ont vieillis. Ils s'adorent d'un amour sans faille, passent tout leur temps libre à se bécoter, brûlent en leurs dernières années leur passion restée si longtemps en sommeil. Je suis romantique, ce soir. Ca doit être l'effet du dernier lied que j'ai composé.
Evidement, maman, ambitieuse comme elle est, ne s'est pas arrêtée en si bon chemin dans sa carrière. Pas de retraite pour les braves ! Elle est officiellement dirigeante du monde libre. Pauvre monde libre, avec quelqu'un d'aussi tordu que ma mère aux commandes. Le pouvoir absolu corrompt absolument, mais là, c'était déjà fait.
Oui, je suis réaliste sur les principes moraux de maman. Je l'adore, mais je suis lucide.
L'hiver est arrivé, et la neige avec lui. Chaque hiver, dans une exploitation agricole comme la nôtre, dragon vert ou pas, tout le monde pousse un grand "ouf". Mais celle qui profite le mieux de l'hiver, c'est petite Luciane. De batailles de boule de neige en bonhommes, elle hante les squares de Dragon Valley.
Elle reste toujours aussi mignonne, toujours aussi poltronne, et c'est la meileure élève de sa classe. Cela dit, on a dû congédier Brunehilde. Heureusement que Natty est une psychopathe du ménage frénétique.
P'tit bouchon n'a quand même pas eu de chance : sa seule sortie scolaire était au mausolée.... Elle a joué avec les crânes comme les autres enfants, mais elle avait un joli teint verdâtre en rentrant.
Elle grelottait, et je ne crois pas que c'ait été simplement de froid....
Natty aussi aime bien l'hiver à Dragon Valley. Elle y trouve toujours d'intéressantes occupations, de nouvelles façons de se distraire...
Le froid n'a pas l'air de l'inhiber. Si les plantes sont en dormance sous la couche de neige qui s'étend sur la vallée, pas les végésims, apparemment.
Les soirs, elle me parle innocemment de ses conquêtes. Elle a quand même réussi, durant cet hiver, à faire crac crac avec plus de cinq partenaires différents, toujours dans un nouvel endroit. Et elle me raconte, par le menu, ses techniques de drague. Le pire, c'est qu'elle le fait avec tant de candeur qu'elle me fait rire. Je devrais pleurer sur mon célibat, mais non : j'attends ses récits avec impatience, comme un palpitant feuilleton. Trop irréaliste et fou pour susciter la jalousie ou l'envie.
Je ne sais toujours pas quel est son projet secret, mais il touche à son terme. Elle est enfin satisfaite de son oeuvre mystérieuse.
Du coup, elle s'est lancé dans une grande campagne de coups de fils et de courriers. L'heure n'est plus aux plans, mais à la réalisation...
Salut, Journal !
Bref, la vie est belle. J'enchaîne promotions sur promotions. Si je n'avais pas laissé traîner mon repas trois semaines dans le frigo de la salle de repos, au point que l'équipe de décontamination de la cité des sciences ait dû intervenir, la vie serait superbe.
Je m'amuse comme un petit fou à retomber en enfance une fois la porte franchie. Batailles de polochons, disputes pour rires, longues conversations au coin de la cheminée... Je n'ai pas envie que Natty reparte.
Mais aujourd'hui, elle m'a surtout serré dans ses bras en me souhaitant bonne chance. Parce qu'aujourd'hui, c'est le grand jour...
Aujourd'hui, je me suis enfin lancé. Je vais à mon premier rencard depuis l'arrivée de Natty. Je vais expérimenter ses leçons en pratique.
Saint Patron des losers, priez pour moi.
Dingue, ça ! Je suis charmant, séduisant... efficace.
Zou ! C'est dans la poche ! Incroyable, mais vrai : je vis (enfin) mon premier baiser. Avec une fille plutôt mignonne, en plus, et chouette. Elle s'appelle Johanna Mithrilen, et elle est douce, intelligente, sympathique... Jolie...
Elle m'a raccompagné prendre un dernier verre après notre journée de sortie.
Et là, je l'ai largué ! Natty, quand j'ai conclu mon récit, était interloquée. "Mais qu'est ce qu'elle t'avait fait, cette fille ? Elle était juste parfaite pour toi ! Tu as eu une attaque, je ne sais pas moi, un accès de délirium, un dragon noir t'a jeté un sort ? Elle avait tout pour elle !" Non, Natty, il lui manquait quelque chose, quelque chose d'essentiel...
Elle ne me faisait pas rire...
Voilà, Journal. La femme de ma vie est bizarre, nymphomane, plutôt rondelette, et j'ai mis près d'un an à me rendre compte que je tenais à elle plus que tout. Parce qu'avec elle, la vie est simple. Et belle.
Avec elle peu importe que je sois un loser.
Dans quelque temps, quand Luciane deviendra adulte, on quittera les Tourelles pour planter nos propres petits végésims. Et quand, à leur tour, ils se mettront à photosynthétiser, je les chercherais dans tous le jardin, comme j'ai cherché Natty en ce premier jour de printemps.
Bon, faut dire, ça surprend...
La femme que j'aime parle aux plants de camomille. La belle affaire ! On a tous nos petites particularités... Et, après une longue conversation sur l'importance de la pollennisation, elle a l'air si heureuse...
OK, Natty drague un peu tout ce qui bouge ; c'est dans sa nature. Mais bon, si elle arrive à se limiter aux pommiers du jardin, je devrais pouvoir m'y faire.
Encore quelques promotions, et j'aurai réalisé mon rêve : je serai compositeur de bandes originales. Finalement, je crois que je ne m'en tire pas si mal, de ma vie...